Par André Mousseau

L’idée originale.

On était à la fin de l’érection de notre nouvelle serre de 15 000 pieds carrés, lorsque l’idée me frappa, comme la pomme de Newton : il nous arrivait assez fréquemment de devoir ouvrir le toit de nos serres même en février à -20*C pour extirper le surplus de chaleur et d’humidité préjudiciables à nos plantations. Je pensai alors, pourquoi ne pas profiter pleinement de l’effet de serre, en emmagasinant ce surplus de chaleur et s’en servir le soir en inversant la thermopompe pour éviter de devoir chauffer.

Les difficultés à l’articuler — les ingénieurs…

On nous demande toujours de recourir aux services d’ingénieurs afin d’articuler les tenants et aboutissants pour postuler à différents programmes ou subventions potentiels. La première difficulté : Comme cela n’avait jamais tenté, dans une serre, les modèles que pourraient utiliser les ingénieurs n’existent pas. Ils ont tenté de proposer des études d’ensoleillement, qui se sont révélées être des études de clarté…, d’autres études sur les besoins de chauffage sur les bâtiments fermés, où le potentiel du soleil s’avérait non signifiant, etc. rien qui s’appliquait à notre propos. Ils édictaient des résultats avant de faire la recherche. Ce qui nous a fait douter, non pas de notre idée, mais de pouvoir réaliser la recherche à son propos.

Un programme de développement de nouvelles technologies

Finalement, chez Gobeil Dion, on a saisi le sens du projet et préparé avec nous, une demande au Programme de développement de nouvelles technologies d’Énergir.

Malgré une subvention potentielle avantageuse, il nous fallait préciser quel serait le nombre d’années de recouvrement de nos propres coûts, si le projet était viable et répondait à la théorie présumée. Une économie potentielle de 9 000 $ de gaz naturel était vérifiable. Et, on était pressés par un échéancier de débuter la production dans notre nouvelle serre.

Collaboration d’Énergir

Nos ingénieurs après avoir validé les spécificités du programme précité, auprès des dirigeants d’Énergir, nous ont préparé le projet et défini les objectifs recherchés et le projet fut accepté avec une subvention importante. Nous sommes allés de l’avant. Il fallait donc un plancher de béton de 6 po minimum afin d’y passer la tuyauterie qui lui permettrait d’agir comme une batterie thermique. Comme le sol chez nous est composé de glaise, presque toujours saturée d’eau, la chaleur pourrait même s’accumuler sous le plancher de béton.

Normalement, les unités de thermopompes sont installées à l’extérieur des bâtiments. Mais la nôtre devait pour être efficace, être située à l’intérieur. Elles ne sont pas faciles à trouver de ce modèle-là, délai de plusieurs mois, mais comme le plancher était coulé, on a pu commencer à installer nos tables (inondables et mobiles), sauf dans la section où on devait transporter l’appareil pour aller la positionner à l’endroit le plus ensoleillé de notre serre.

Les résultats recherchés,

Pendant combien d’heures par jour et combien de jours aurions-nous avantage à faire marcher la thermopompe afin de diminuer et la température et le niveau d’humidité dans les serres. Nous pensions que chaque journée où le soleil brillait et que nous atteignions 20 degrés C dans la serre nous aurions avantage à utiliser le système. Ce qui s’avéra. Grâce aux nombreux contrôles et sondes installées par Damatex, nous pouvons suivre chacun des paramètres. Un suivi sur une période d’un an sera nécessaire, pour bien s’assurer de la pérennité du système d’accumulation de la chaleur dans le plancher jusqu’à 30 degrés et libération durant la nuit pour revenir à 20 ou 21 degrés au petit matin. Nous sommes à mesurer la diminution du temps de chauffage et partant la réduction des coûts et la diminution des gaz à effets de serre créés par la combustion du gaz naturel.

Contrôle de l’humidité

La diminution du taux d’humidité nuisible à la progression de nos cultures et ordinairement créateur de maladies est un problème pour toutes les cultures en serre. Les prémisses de notre projet faisaient en sorte que si le taux d’humidité dépassait 70 %, notre barème chez nous, la thermopompe parte et évacue le surplus. Plutôt que d’ouvrir les volets qui occasionnent le besoin d’utiliser le chauffage et créer des gaz à effets de serre supplémentaires, pour remplacer la chaleur ainsi perdue. Voilà pour certains producteurs un avantage indéniable.

Résultats préliminaires

Bien que nous devions accumuler les résultats pendant un minimum de 12 mois pour tirer une conclusion claire et mesurée, voici quelques résultats révélateurs

Heures d’utilisation de la thermopompe : du 1er mars au 15 avril 460 heures

Chaleur moyenne accumulée dans le plancher : pour la même période, la chaleur dans le plancher mesurée à 6 pouces a atteint un maximum de 27 degrés. Dans le sol à 12 po, 24 degrés. Et dans le sol à 24 pouces, elle est passée de 19,5 à 23,5 sur le mois et demi observé.

Diminution du taux d’humidité : comme on ne monitorait cet élément avant, il est difficile de calibrer une différence notable.

Le bien être augmenté de nos employés via la climatisation : pas encore évalué, mais on a hâte de comparer cet été.

La suite…

 Une fois les études bien documentées, après un minimum de 12 mois, il restera à déterminer comment on pourra maximiser les bénéfices. Doit-on rediriger la chaleur enfermée dans le plancher avec la thermopompe pour chauffer la nuit ou si la seule radiation sera suffisante ? Peut-être que la thermopompe pourra être utilisée aussi l’été, quand le plancher est déjà chauffé au maximum pour notre système racinaire ? Il faudra vérifier si nous devons aller de l’avant avec une deuxième thermopompe dans la même serre, comme prévu. Quels seront les bénéfices augmentés et quel sera le temps de récupération du montant que nous devrons débourser, après les aides disponibles ?

On vous tiendra au courant… de l’évolution cette innovation. C’est la première fois que le principe de l’effet de serre est utilisé pour diminuer les gaz à effet de serre.

Par André Mousseau

Merci à nos collaborateurs ; Énergir, Gobeil Dion, Plombexel, Axar Électrique, Gérard Roberge et Damatex.